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Publié le par Chouette et chouette

Le jugement que l’on peut porter sur les inégalités de revenus dépend de l’échelle de temps et de l’instrument de mesure que l’on utilise. Contrairement à une thèse répandue, la question n’est pas de "faire dire ce qu’on veut aux chiffres", mais de se mettre d’accord à la fois sur les dates d’observation et les outils.

Depuis les années 1970

L’outil utilisé le plus souvent pour mesurer les inégalités de revenus est le rapport entre ce que touchent les 10 % les plus riches et ce que touchent les 10 % les plus pauvres. C’est une mesure relative des inégalités. Les statisticiens appellent cet indicateur, le "rapport interdécile". Plus exactement, il ne s’agit pas de ce que "touchent" les plus riches et les plus pauvres, mais de valeurs limites : le rapport entre le niveau de vie minimum des 10 % les plus riches (ce qui s’appelle un décile, le neuvième) et le niveau de vie maximum des 10 % les plus pauvres (un autre décile, le premier). Tout cela, après impôts directs et prestations sociales.

Avec cet outil, et si l’on observe les choses depuis les années 1970, la diminution est nette : le rapport interdécile est passé de 4,8 à 3,1. On peut bien parler d’une baisse des inégalités qui a lieu de 1970 à 1984, ensuite l’évolution est très faible.

Rapport entre le niveau de vie des 10 % les plus riches et celui des 10 % les plus pauvres
  1970
1975
1979
1984
1990
1997
1999
2003
2004
2005
2007 *
Rapport 4,8 4,3 3,8 3,5 3,4 3,3 3,2 3,2 3,1 3,1 3,1
Revenu après impôts et prestations sociales. Ne comprend pas environ 80% des revenus du patrimoine. Lecture : en 2005, le niveau de vie le plus bas des 10 % les plus riches était 3,1 fois supérieur au niveau de vie le plus élevé des 10 % les plus pauvres. Légère rupture de série en 2002.
Source : Insee - Enquêtes revenus fiscaux Insee - * Estimation pour 2007

L’évolution entre 1998 et 2008

Il est juste de mesurer les évolutions des inégalités sur une longue période, les commentaires sur les variations d’une année sur l’autre n’ont pas grande valeur compte tenu des écarts de mesure. Mais remonter 40 ans en arrière est tout même une bien longue période. Si l’on se concentre sur les dix dernières années, l’observation est différente. Surtout si à la place des "déciles", on observe le revenu moyen de chaque tranche de 10 %. Une très forte progression des 5 % les plus riches peut ne rien modifier à la valeur du neuvième décile (celui qui sépare les 90 % les moins riches des 10 % les plus riches), mais elle va accroître la valeur moyenne de la tranche. Les moyennes comprennent des très bas et des très hauts revenus, qui ne sont pas pris en compte quand on ne s’intéresse qu’aux valeurs limites des tranches.

L’observation que l’on peut faire sur dix ans est sensiblement différente. Entre 1998 et 2008, le niveau de vie moyen des 10 % les plus pauvres a progressé de 13,7 % soit 970 euros, une fois l’inflation déduite. Le niveau de vie moyen des 10 % les plus riches a augmenté de 27,3 % soit… 11 530 euros. L’écart relatif entre ces deux catégories a augmenté : les plus modestes touchent 6,7 fois moins que les plus aisés, contre 6 fois en 1998. En valeur absolue, l’écart est passé de 35 170 à 45 730 euros. En moyenne, les 10 % les plus riches ont gagné près de 10 mois de Smic net supplémentaire en dix ans.

Evolution des niveaux de vie moyens annuels par tranche de 10 % pour une personne
  1998 (en euros)
2008 (en euros)
Gain en euros
Gain en %
Niveau de vie moyen des 10 % les plus pauvres 7 100 8 070 970 13,7
Niveau de vie entre les 10 et 20 % 10 100 11 860 1 760 17,4
Niveau de vie entre les 20 et 30 % 12 050 14 190 2 140 17,8
Niveau de vie entre les 30 et 40 % 13 790 16150 2 360 17,1
Niveau de vie entre les 40 et 50 % 15 530 18 010 2 480 16,0
Niveau de vie entre les 50 et 60 % 17 430 20 040 2 610 15,0
Niveau de vie entre les 60 et 70 % 19 660 22 400 2 740 13,9
Niveau de vie entre les 70 et 80 % 22 540 25 580 3 040 13,5
Niveau de vie entre le 80 et 90 % 27 130 30 990 3 860 14,2
Niveau de vie des 10 % les plus riches 42 270 53 800 11 530 27,3
 
Rapport entre les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres 6,0 6,7    
Ecart entre les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres (en euros) 35 170 45 730    
Après impôts et prestations sociales. Les séries ont été reconstituées pour éviter les ruptures de série qui existent en 2002 et 2005. Un décile est une tranche de 10 % de la population
Source : calculs de l'Observatoire des inégalités d'après l'Insee.

Que s’est-il passé depuis 2008 ?

Tout en haut de la pyramide des revenus, les revenus financiers représentent une part importante des ressources et en 2009-2010 ce type de revenus a enregistré des performances moins bonnes. Mais il en est de même pour les plus bas revenus, lourdement frappés par la crise, et pour qui les pertes de ressources auront des conséquences bien plus dramatiques que pour ceux qui vivent de leurs rentes...

Conclusion :

Plus personne ne peut contester la hausse des inégalités dans les années récentes. Principalement parce que les revenus des très riches se sont envolés. Entre 2004 et 2007, les 0,01 % les plus riches ont vu leur revenu annuel s’accroître de 360 000 euros ! (données avant impôts, voir le tableau ci-dessous). Les inégalités se sont aussi accrues au niveau des 10 % les plus riches : le neuvième décile a touché 5 000 euros de plus en dix ans, ce qui reste modeste rapporté aux 0,01 % les plus riches, mais qui représente cinq fois plus que le gain du premier décile. Avec retard et avec moins d’ampleur, la France suit le chemin emprunté par les Etats-Unis dès le milieu des années 1970 et la Grande-Bretagne quelques années après. Les baisses d’impôts effectuées depuis dix ans ont accompagné ce mouvement.

2004-2007 : la hausse des plus hauts revenus
Evolution des revenus annuels déclarés par personne
  2004 (en euros)
2007 (en euros)
Hausse (en %)
Hausse en valeur
De 0 à 90 % les plus bas 15 490 16 913 + 9 + 1 423
10 % les plus riches 43 379 48 003 + 11 + 4 624
1 % les plus riches 101 922 118 634 + 16 + 16 712
0,1 % les plus riches 263 017 335 246 + 27 + 72 229
0,01 % les plus riches 907 932 1 269 555 + 40 + 361 623
Ces revenus ne prennent pas en compte les impôts.
Source : Insee.

Voir nos articles :

- Comment mesurer les inégalités : c’est quoi un décile ? A quoi ça sert ?.

- Riches, toujours plus.

Article mis à jour le 26 octobre 2010

Publié dans infos

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C
<br /> il ne reste plus qu'à se dire que ce qui fait la richesse d'un homme se situe ailleurs... héhé<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> A n'en pas douter.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> coucou je suis la Dame X de "tant qu'ils auront du pain" tu es passée hier sur mon blog et je t'en remercie. je te mets la réponse que j'ai envoyé à Zerlina suite à son com...<br /> <br /> coucou c'est re moi...je suis étonnée car tu me suis dans mes posts, tu sais bien que je ne suis pas encore en retraite ma chérie, mais licenciée en 2003 et travailleuse handicapée, je n'ai jamais<br /> retrouvé d'emploi, j'ai milité pendant des années, ma dernière bagarre a été le CPE et on a gagné, là les syndicats s'y sont pris comme des manches...fallait pas prendre la retraite comme<br /> sujet...je suis passée par le RMI des heures de ménage au black que c'est grâce à ça que j'ai une belle hernie discale...là je suis en AER...depuis 3 ans car j'ai commencé à bosser à 14 ans...600€<br /> par mois, heureusement que je ne vis pas seule...! sinon je serais SDF...la retraite suis en train de faire mon dossier...mais elle ne sera pas très épaisse car dans le commerce...les<br /> salaires...pfft...voilà c'était juste une précision, mais je peux pas toujours tout ré expliquer à chaque coup de gueule...lol...kiss<br /> <br /> bonne journée Chouette Chouette...@plus.<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Sympa d'être là et de me répondre. Je serais allée sur ton blog de toutes façons puisque je vais toujours, voir si réponse il y a, comme je passe toujours sur le blog de "mes" nouvelles<br /> lectrices, nouveaux lecteurs.<br /> <br /> <br /> Je suppose bien que le ras le bol puisse nous saisir à dépenser tant d'énergie pour obtenir des résultats que nous ne devrions même pas à demander si les élus écoutaient un tant soit peu leurs<br /> électeurs !<br /> <br /> <br /> Hélas, il semble qu'une fois élus, rarement élu-e-s, le travail de ces personnes consistent à se donner des privilèges et à ne pas, surtout pas, tenir les promesses faites pendant les campagnes<br /> électorales.<br /> <br /> <br /> D'ailleurs je ne demande aucune promesse. mot qui est mal adapté à un travail d'élu de la nation. On vote pour un programme, à eux de le tenir.<br /> <br /> <br /> Promesse comporte un côté émotif qui est de trop. Je n'ai pas à aimer ces gens là, juste à leur demander des comptes sur ce qu'ils font, à les interpeller si ils dérapent ou oublient...<br /> <br /> <br /> Ce qui est la coutume évidente de cette mascarade que deviennent les élections.<br /> <br /> <br /> A bientôt, bon courage. Comme si il y en avait du mauvais quand on essaye de vivre, simplement !<br /> <br /> <br /> <br />
I
<br /> Si !<br /> C'est exactement ça !<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Euh...  Ah ! oui, tu réponds à mon hypothèse.<br /> <br /> <br /> Merci. Il me semblait bien que je pouvais faire ce parallèle.<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> y'a un truc qui n'entre pas dans les statistiques : c'est le soutien familial ou son absence!<br /> Ce que pèse la solitude.... aggravée avec l'âge...quand on peut moins se défendre!<br /> Certes, les temps ont changé et la "charité est étatisée" : elle permet de survivre mieux que dans le temps jadis.<br /> Bises CHOUETTE,<br /> Gigri<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Tu as raison de soulevé cet aspect.<br /> <br /> <br /> C'est dommage dans ces tableaux mais je pense que ce type de solidarité esr mesuré ailleurs.<br /> <br /> <br /> La solidarité familiale existe mais est silencieuse bien souvent.<br /> <br /> <br /> Je bénéficie quant à moi d'une solidarité amicale et aussi anonyme : un groupe de personnes, par le biais d'une amie, me verse chaque mois depuis 1995 une somme mensuelle. Sans cette solidarité<br /> je ne pourrais pas rester locataire de mon pavillon de banlieu, mes revenus (retraite sécu + retraite complémentaire) ne suffisant pas à ma survie.<br /> <br /> <br /> Je n'ai pas eu assez de trimestres pour bénéficier d'une retraite correcte.<br /> <br /> <br /> J'en parle assez souvent car je pense qu'il faut le dire et le répéter dans une société qui est en phase de repli.<br /> <br /> <br /> Ce n'est pas vrai que l'égoïsme mène le monde.<br /> <br /> <br /> Lorsque que je le pouvais j'ai participé de mouvements solidaires, maintenant c'est moi qui en bénéficie. Ce ne sont, évidemment, pas les personnes que j'ai aidées qui me renvoie la balle, mais<br /> le système tourne et c'est bien.<br /> <br /> <br /> La solitude, c'est plus difficile à alléger. Cela demande du temps et c'est souvent ce qui manque aux gens en activité.<br /> <br /> <br /> Je sais que certains des amis aidant le disent : un chèque c'est vite fait, cela ne nous pénalise pas, cela ne nous prive pas non plus et pourrait nous donner bonne conscience à pas cher... Le<br /> temps c'est plus compliqué.<br /> <br /> <br /> Dans la religion juive il y a un dicton qui dit la même chose et qui met en valeur le temps plus que l'argent, sans dédaigner l'aspect financier bien sûr.<br /> <br /> <br /> Complexe tout ça.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> intéressantes ces statistiques!<br /> Je reviendrai y jeter un oeil.<br /> Bonne nuit.<br /> Je t'embrasse,<br /> Gigri<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Oui, elle le sont.<br /> <br /> <br /> Bises.<br /> <br /> <br /> <br />